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Classements et mensonges dans la valorisation
03/02/2023

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Classements et mensonges dans la valorisation

N’importe qui travaillant en banque d’affaires ou dans les agences de publicité (mais la liste n’est pas exhaustive) sait que les classements publiés sur les opérations de l’année passée sont à prendre. . . pour ce qu’ils sont.

par Pascal Quiry

N’importe qui travaillant en banque d’affaires ou dans les agences de publicité (mais la liste n’est pas exhaustive) sait que les classements publiés sur les opérations de l’année passée sont à prendre… Pour ce qu’ils sont. Sans parler de choix méthodologiques propres à ceux qui les établissent. Bon nombre d’acteurs gonflent d’une façon ou d’une autre leurs chiffres pour apparaître plus haut dans les classements qu’ils ne le sont en réalité.

Classement : des valeurs d’entreprise surestimées

François Derrien et Olivier Dessaint avaient ainsi montré, en 2018, qu’une banque a d’autant plus de probabilité de réaliser des avis d’équité à bas prix, permettant de se faire créditer d’une transaction de fusion-acquisition qu’elle n’a pas conseillée, que sa position à mi-année dans les classements est en baisse par rapport à l’année précédente.

Il n’en n’est pas différemment dans les start-ups. Comme l’établit une étude, dont nous publions le résumé dans La Lettre Vernimmen de janvier. Si devenir une licorne suppose de dépasser une valorisation de 1 Md, celle-ci est calculée en prenant le prix d’émission des actions lors de la dernière levée de fonds et en le multipliant par le nombre d’actions en circulation :

Valorisation = Prix d’émission des actions x Nb d’actions en circulation

Quoi de plus normal, nous direz-vous ? Sauf que dans le monde des jeunes pousses, chaque levée de fonds est différente. Au sens où les nouvelles actions émises bénéficient de droits particuliers, dont ne bénéficient pas les actions déjà émises :

  • Priorité dans l’appropriation du produit de la vente éventuelle,
  • Taux de rentabilité minimum garanti aux derniers investisseurs le cas échéant,
  • Droits de veto divers (introduction en Bourse, recrutements au-delà d’un certain niveau, etc.).

Dès lors, ces actions valent plus cher que les actions déjà émises. Et c’est abusif de prendre le prix de ces actions privilégiées pour le prix de toutes les actions. Les auteurs de cette étude estiment qu’en moyenne la valeur de l’entreprise est surestimée de 48 %. Et que 65 des 135 licornes qu’ils ont étudiées ne sont que des centaures (valeur supérieure à 100 M).